DIMANCHE EN POLITIQUE SUR FRANCE 3 N°103 : MARINE LE PEN
Le 17 mars 2019, Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national et députée du Pas-de-Calais, est l’invitée de "Dimanche en politique", le magazine politique de France 3. Elle est interrogée par Francis Letellier, avec à ses côtés Frédéric Says, éditorialiste à France Culture.
Au sommaire
- L’enjeu des européennes sera-t-il l’Europe ou le pouvoir d’achat ?
- Pourquoi Marine Le Pen cherche-t-elle sa réserve de voix à droite ?
- Entre grand débat et "gilets jaunes", quelles réponses aux Français ?
La présidente du Rassemblement National Marine Le Pen a notamment été interrogée sur les violences qui sont intervenues samedi 16 mars en marge du mouvement des "gilets jaunes". Elle a demandé "la dissolution de ces groupuscules d'extrême gauche qui sont connus, qui œuvrent hélas, en cassant tout". "Emmanuel Macron a eu le sentiment qu'il était remonté dans les sondages lorsqu'il y avait toutes ces exactions parce qu'il souhaitait incarner l'ordre. A force de vouloir incarner l'ordre, il laisse le désordre se disséminer semaine après semaine."
Nouvelle-Zélande: Marine Le Pen dit ne "pas connaître" la thèse du "grand remplacement"
Paris, 17 mars 2019 -AFP-
Marine Le Pen a déclaré dimanche qu'elle ne "connaissait pas" la thèse du "grand remplacement", citée par l'auteur du carnage en Nouvelle-Zélande qui, à ses yeux, "ne vaut pas mieux que Daech".
"Je ne connais pas cette théorie du +grand remplacement+. Je n'ai jamais utilisé ce terme-là", a déclaré sur France 3 la présidente du Rassemblement national.
Les partisans de cette thèse complotiste et raciale considèrent que la population blanche européenne (et chrétienne) est "remplacée", de manière organisée, par une population immigrée de couleur (et musulmane), et accusent le "multiculturalisme" d'en être la cause.
L'adhésion à cette thèse est deux fois plus forte chez les sympathisants du RN que parmi la moyenne des Français, selon une étude de l'Ifop pour la fondation Jean Jaurès et l'observatoire Conspiracy Watch publiée en février.
Brenton Tarrant, l'extrémiste australien, auteur du massacre en Nouvelle-Zélande, a évoqué dans un manifeste un "génocide blanc" du fait de l'"immigration de masse" et des "envahisseurs", et affirme que les facteurs déterminants ont été la défaite à la présidentielle de 2017 de Marine Le Pen et la mort de la petite Ebba Åkerlund à 11 ans dans une attaque au camion-bélier en 2017 à Stockholm.
Marine Le Pen a noté que le tueur citait "beaucoup de gens et beaucoup de choses et n'importe quoi d'ailleurs dans son manifeste".
"Il dit qu'il a été déçu par l'élection d'Emmanuel Macron. Il dit aussi qu'il est pour la défense du climat et que son acte vise à éviter la surpopulation. Est-ce que pour cela, vous vous permettriez objectivement de faire un lien entre ce barbare et les gens qui ont manifesté hier pour le climat?", a-t-elle demandé.
"Au RN nous n'avons jamais lutté contre les musulmans. Nous ne luttons pas d'ailleurs contre l'islam, qui est une religion. Nous luttons contre le fondamentalisme islamiste, qui est une idéologie qui a fait des centaines d'attentats dans le monde, y compris contre des mosquées", a fait valoir la députée du Pas-de-Calais.
Selon elle, "il n'y a pas d'islamophobie en France" ni "de mouvement d'ailleurs qui expose une théorie contre l'islam. Il y a des gens qui luttent contre le fondamentalisme islamiste".
Lors de sa rentrée politique à Fréjus (Var) en septembre, Marine Le Pen avait dénoncé sur Twitter une immigration qui fera disparaître "par dilution ou substitution" culture et mode de vie, s'en prenant à la "folle politique immigrationniste" de l'UE.
Violences à Paris: l'opposition dénonce un "laxisme sécuritaire"
Paris, 17 mars 2019 -AFP-
L'opposition s'interrogeait encore dimanche sur "le laxisme sécuritaire" voire le laisser-faire de l'exécutif face aux "casseurs professionnels" qui ont saccagé une partie des Champs-Elysées à Paris, le gouvernement dénonçant une "polémique" inutile et "de la petite politique politicienne".
- Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national "Le gouvernement a pris des décisions de dissolution à l'égard de toute une série de groupuscules d'ultradroite. C'est bien de le faire, mais il faut aussi le faire pour l'ultragauche".
"Il semblerait que les arrestations de ces casseurs professionnels, ils n'arriven pas à les faire. Or ils savent qui ils sont".
Interrogée pour savoir si ces violences "arrangeaient" le gouvernement, comme l'affirme le député LR Eric Ciotti dans le JDD, Mme Le Pen a répondu: "On peut se poser la question pour une raison simple: Emmanuel Macron a eu le sentiment qu'il avait remonté dans les sondages lorsqu'il y avait eu toutes ces exactions parce qu'il souhaitait incarner l'ordre". (France 3)
- Xavier Bertrand, président (ex-LR) de la région des Hauts-de-France : "Ça ne s'arrêtera pas comme ça. Le gouvernement ne doit pas avoir peur de faire usage de la force et de la force du droit". "Pourquoi les forces de l'ordre ne sont pas intervenues, quelles consignes ont été données?"
"Il faut faire la différence entre les manifestants et les émeutiers". Ces derniers, "si vous voulez clairement les dissuader, il faut les mettre derrière les barreaux".
Avec le grand débat, "il ne faut pas chercher à gagner du temps, il faut apporter des réponses claires, et des réponses fortes". "Je voudrais que la main qui tient la barre de l'Etat tienne cette barre de façon ferme, et beaucoup plus ferme". (France-Inter/France Télévisions/Le Monde)
François-Xavier Bellamy, tête de liste LR aux européennes :
"Aujourd'hui, nous sommes devant un laxisme sécuritaire qui fait qu'on peut s'en prendre aux forces de l'ordre".
"Ce gouvernement a failli. Il ne s'agit plus de mettre en scène par des jeux de communication qui ne convainquent plus personne cette impuissance collective. Il faut agir".
"Si au coeur même de notre capitale, l'ordre public n'est pas respecté alors combien plus dans tant de villes dans tant de quartiers, combien l'ordre républicain est en train de faillir". (BFMTV)
- Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France: "Comment est-il possible d'arrêter préventivement des "gilets jaunes" mais de laisser les casseurs venir librement sur les Champs-Elysées sans les arrêter, alors même que ces derniers sont parfaitement connus des services de renseignement ?
Comme je le demande depuis le 1er décembre, face à l'incompétence ou au cynisme du gouvernement, une commission d'enquête parlementaire s'impose.
Le grand débat est maintenant arrivé à son terme. Emmanuel Macron n'a plus aucune excuse pour laisser pourrir la situation. Il doit désormais soumettre aux Français des mesures économiques et sociales précises, que seul le peuple est à même de trancher par le suffrage universel". (communiqué)
- Olivier Faure, premier secrétaire du PS : "Je m'interroge sur la stratégie du gouvernement, on voit bien qu'ils sont entrés dans une logique sécuritaire et que ça leur permet d'esquiver un autre débat, le débat social".
"Il y a aujourd'hui un gouvernement qui à l'évidence ne fait pas son travail". "Je m'interroge sur la façon dont on maintient l'ordre dans ce pays".
"Oui, il y a une nécessité de maintenir l'ordre, mais au-delà il y a quand même une question centrale, et moi je ne voudrais pas que le gouvernement utilise la question sécuritaire pour esquiver, escamoter, un autre débat, qui est le débat social". (Europe 1/Les Echos/CNews)
- Agnès Buzyn, ministre de la Santé - "Je trouve que ce sont des propos polémiques. Personne ne peut imaginer que ça serve qui que ce soit, que ça serve notre pays, l'image du pays est dégradée, ça nuit à la croissance. Qui peut imaginer que l'on ne souhaite pas de la croissance en plus pour diminuer le chômage? Tout celà est extrêmement nuisible pour notre pays et je pense qu'aujourd'hui les personnes qui amènent à manifester dans la violence, et notamment les leaders des "gilets jaunes", sont des nihilistes qui ne souhaitent pas que le pays s'en sorte." (LCI - LeFigaro- RTL)
Arriver en tête des européennes
A propos des élections européennes, si son parti n'est pas en tête des suffrages, Marine Le Pen considérera que ce sera un échec. "Ce sera surtout un échec pour tous les Français, car si Emmanuel Macron arrive en tête de ces élections, il va se sentir pousser des ailes et il va se dire 'c'est bon je peux remettre en branle l'intégralité des réformes que je veux appliquer' et qui sont des réformes qui vont passer au rabot tout notre système de protection sociale."
Européennes: Le Pen et Loiseau prolongent leur débat via les médias
Paris, 17 mars 2019 -AFP-
Marine Le Pen et Nathalie Loiseau, qui ont débattu jeudi sur France 2, ont continué à ferrailler à distance dimanche, la présidente du RN critiquant "une mauvaise entrée en campagne" de la ministre tandis que celle-ci revendiquait sa "spontanéité".
Marine Le Pen a jugé sur France 3 que l'annonce, par Mme Loiseau, de sa candidature pour les élections européennes, à la fin de l'émission jeudi, était une "assez mauvaise entrée en campagne" et "assez téléguidée".
"Quand je suis arrivée sur le plateau, je me suis dit qu'il fallait que j'arrête de me défiler. Je ne m'étais pas défilée pour venir" affronter Marine Le Pen, a de son côté déclaré sur Radio J la ministre des Affaires européennes, "prête" à mener la liste LREM aux élections de mai.
"Est-ce que sur la forme c'était réussi? Sûrement pas", a-t-elle convenu. "J'ai mon pris mon risque", "je l'ai fait avec spontanéité. Alors ceux qui sont habitués aux vieilles bêtes du cirque politique ont été désarçonnés. (...) Et puis si j'étais cynique, je dirais que tout le monde en a parlé. Et que tout le monde le sait", a-t-elle poursuivi.
La ministre chargée des Affaires européennes "est un symbole du macronisme. (...) Je pense que de toute sa vie elle n'a pas croisé un électeur", a affirmé la présidente du Rassemblement national.
"En réalité elle fait partie de ces élites qui sont totalement déconnectées du peuple. (...) Elle ne cesse de proposer une Europe qui soit une Europe fédérale. Elle fait comme si le peuple n'existait pas", a-t-elle dénoncé en évoquant le "non" de la France au référendum de 2005 sur une constitution européenne.
A la question de savoir si elle était candidate contre Mme Le Pen, Mme Loiseau a fait valoir qu'"aller aux européennes, ce n'est pas aller contre, c'est aller pour un projet, c'est aller pour une Europe qui a besoin d'être revue".
A la fin du magazine, l'invité (e-s) politique expose son avis "Sur le vif " : Marine Le Pen a été prise de court.